P*tain de facteur humain est un essai percutant qui démonte les faux-semblants du management et invite à remettre l’humain au cœur de l’entreprise.
Burn-out, désengagement, perte de sens, greenwashing… Le monde du travail traverse une crise existentielle. Les recettes miracles du management n’enracinent plus rien de solide. Les salariés s’épuisent à cocher des cases pendant que les entreprises s’agitent à coups de slogans creux.
C’est dans ce contexte qu’Hélène Schetting signe P*tain de facteur humain (Éditions Gereso). Un titre provocateur pour un essai salutaire. L’autrice appelle à une révolution douce mais radicale : celle du management humaniste. Ici, pas de vernis RSE ni de jargon corporate. L’autrice parle vrai, démonte les illusions et invite à repenser le travail à partir de ce qu’il devrait toujours être : une aventure profondément humaine.
Hélène Schetting, une voix singulière du management éthique
Ancienne directrice marketing dans des environnements hyper compétitifs, enseignante en management depuis quinze ans et aujourd’hui consultante en transformation organisationnelle, Hélène Schetting a vu l’entreprise de l’intérieur – et dans toutes ses contradictions.
Elle dirige un cabinet spécialisé dans la conduite du changement et accompagne les dirigeants qui souhaitent conjuguer excellence opérationnelle et management humaniste. Son credo : « Ne fais pas aux autres ce que tu ne veux pas qu’on te fasse. »
Entre lucidité, humour et franc-parler, elle prône un leadership incarné, éthique et profondément respectueux des individus. Une approche teintée d’un humanisme à la Rousseau et d’un goût certain pour la provocation bien dosée.

L’entreprise, ce théâtre des illusions
Depuis des décennies, le management s’appuie sur des méthodes universelles censées s’appliquer à tous. Résultat : on parle beaucoup de « culture d’entreprise », mais on oublie ceux qui la font vivre. Hélène Schetting démonte cette mécanique bien huilée, où les process étouffent le bon sens et où la communication supplante la sincérité.
Elle dénonce les faux-semblants d’un monde qui confond transformation et cosmétique : plans RSE, chartes QVT, labels ESG… autant d’écrans de fumée qu’elle nomme, avec ironie, des « mensonges organisés ». Derrière le vernis de la vertu, les entreprises continuent souvent à valoriser la productivité à tout prix, quitte à user leurs collaborateurs.
Mais l’autrice ne se contente pas de pointer du doigt. Elle analyse, démonte, puis reconstruit.
« Nous sommes le problème, mais aussi la solution. »
Santé mentale, quête de sens et besoin de transformation
L’un des grands mérites de l’ouvrage est de mettre des mots justes sur ce que beaucoup ressentent sans oser le dire. La détresse psychologique au travail touche aujourd’hui plus d’un tiers des salariés en France (source : Baromètre Empreinte Humaine, 2023).
Hélène Schetting parle de cette « apocalypse douce » : un effondrement silencieux de la santé mentale dans les open spaces. Elle s’attaque au grand bluff du bien-être – les Chief Happiness Officers qui distribuent des smoothies pendant que les équipes craquent.
Son diagnostic est clair : les entreprises doivent arrêter de traiter les symptômes et s’attaquer aux causes profondes. La perte de sens et le manque de reconnaissance rongent la motivation. Elle évoque les « bullshit jobs » théorisés par David Graeber : ces métiers vides de sens où l’on alimente la machine administrative sans créer de valeur.
Et surtout, elle brise un tabou : celui de la santé mentale des femmes. Exposées à la double peine du sexisme et du perfectionnisme, elles sont deux fois plus touchées par les troubles anxieux.
Hélène Schetting invite à créer des espaces de parole, à former les managers à l’écoute, et à remettre la bienveillance – la vraie, pas la niaiserie – au cœur du leadership.
Vers de nouveaux modèles et d’autres manières de diriger
Après le constat, place à l’action. Et c’est là que P*tain de facteur humain fait la différence. Chaque chapitre se clôt par une série de questions maïeutiques et des sketchnotes qui transforment la lecture en véritable atelier de réflexion.
L’autrice décrit des alternatives concrètes au modèle vertical :
- L’entreprise libérée, où la confiance précède le contrôle.
- Le modèle Opale, fondé sur l’autogouvernance, la plénitude au travail et une raison d’être évolutive.
- Le management des « girafes », inspiré de la communication non violente de Marshall Rosenberg, qui repose sur l’observation sans jugement, la reconnaissance des besoins et des demandes claires.
Elle défend un leadership bienveillant qui n’exclut pas l’exigence : un « gardien du cadre » capable de poser des limites tout en donnant de la liberté. Un leader qui fait confiance, qui inspire, et qui assume sa part d’humain.
Enfin, elle imagine l’émergence de « nouveaux leaders » : plus conscients, plus ancrés, porteurs de valeurs. Des bâtisseurs de collectif qui savent que la performance durable passe par la qualité des relations humaines.
P*tain de facteur humain n’est pas un énième guide de management à la mode. C’est un essai salutaire qui invite à regarder le travail autrement : comme une aventure collective, créative et profondément humaine.
Hélène Schetting n’oppose jamais performance et bienveillance. Elle montre, preuves à l’appui, qu’elles se renforcent mutuellement. Le livre est exigeant, parfois cash, toujours constructif. On en ressort avec des outils, mais surtout avec une envie : oser une autre voie.
Dans un monde où le burn-out menace plus que le chômage, cette lecture agit comme un électrochoc bienveillant. À lire absolument si vous êtes dirigeant, manager ou simplement humain au travail.
Hélène Schetting – P*tain de facteur humain : Burn-out, greenwashing, faux-semblants… et si on parlait vrai ? Éditions Gereso, 250 pages, paru le 9 octobre 2025.

Avis
Un essai percutant, clair et courageux. Hélène Schetting allie expertise et humanisme avec une rare sincérité. À lire d’urgence pour quiconque veut réconcilier performance et respect au travail.

