Midnight Silence débarque directement en video et VOD via The Jokers. Première réalisation de Oh-seung Kwon, décrit la traque d’une jeune femme sourde par un tueur psychopathe. Un pitch alléchant, pour ce qui s’inscrit finalement comme un petit thriller coréen loin d’être déplaisant, malgré des velléités ne parvenant pas à s’affranchir de ses œuvres maîtresses.
Le cinoche coréen est depuis une vingtaine d’années un terreau créatif des plus fertiles et passionnants. Une vague cinématographique des plus marquantes, initiée par Park Chan-wook, Bong Joon-ho ou encore Kim Jee-woon. La première décennie des années 2000 a donc vu pléthore de grands films coups de poing, notamment de purs thrillers violents et jusqu’au-boutistes : Lady Vengeance, Old Boy, The Chaser, I Saw the Devil… Un genre plutôt délaissé depuis quelques années, auquel Midnight Silence tente tant bien que mal de revigorer en occupant cette place vacante !
Midnight Silence s’ouvre donc dans une rue en pleine nuit, alors qu’une jeune femme sort du boulot pour rentrer chez elle. C’est là qu’entre en scène un mystérieux chauffeur du nom de Do-Sik (joué par Wi Ha-Joon, ayant un petit rôle dans Squid Game), se révélant être un tueur en série. Une intro classique et efficace (malgré l’absence vrai caractère graphique), avant de bifurquer vers le quotidien de Kyeong-mi (Jin Ki-joo). Cette employée au sein d’une boîte de télécom est sourde, parle en langage des signes et entretient le doux rêve de vacances ensoleillées avec sa mère (également sourde). Alors qu’elle déambule également de nuit, Kyeong-mi va être témoin de l’enlèvement d’une autre victime, et prise pour cible !
The Chaser sans sucres
Rapidement, Midnight Silence se mue en jeu du chat et de la souris à travers les ruelles, et joue finalement sur le terrain du cultissime The Chaser de Na Hong-jin (The Strangers). Asphalte éclairée par les néons jaunes, course poursuite nocturne, interrogatoire au sein du poste de police, situations tendues en huis-clos ou encore tentative de captation de signal téléphonique… Le réalisateur connait les codes (galvaudés certes), et parvient à proposer une intrigue de bonne tenue, facilitée par une durée d’1h30 sans bout de gras ! Cependant, malgré un caractère régulièrement efficace, Midnight Silence peine à trouver sa singularité, en restant beaucoup trop dans l’ombre de ses aînés !
Cependant, malgré ce côté beaucoup trop programmatique et plus gentillet (point de séquence choc), Kwon Oh-seung amène des notes d’humanité bienvenue. Midnight Silence profite donc d’une tendre relation centrale entre l’héroïne et sa mère, vrai fil rouge émotionnel du métrage. Par petites touches, le film propose par ailleurs un discours intéressant sur la place des personnes en situation de handicap (une scène de dîner où Kyeong-mi est traitée comme une curiosité, ou encore l’incompréhension globale à laquelle elle est confrontée tout au long de l’intrigue). C’est peu, mais a le mérite d’être présent, en plus d’offrir un épilogue relativement touchant !
Psychopato-débutant
On pourra compter sur quelques passages de tension plutôt bien orchestrés (un passage dans un parking ou encore dans la demeure de l’héroïne), mais également des moments de franche rigolade (et pas nécessairement volontaires !) devant quelques errances d’écriture. Il convient de noter que Midnight Silence peut se targuer d’avoir un des tueurs en série les moins méthodiques de l’histoire du cinéma, mais aussi un des plus chanceux (il a lu le script à coup sûr). Do-sik représente heureusement une figure infatigable (ses actions ne sont jamais expliquées ou psychanalysées, ce qui est un bon point), mais le tout vire parfois au Buster Keaton au bout de la énième gamelle ou coup raté de l’antagoniste.
Corée oblige, on tient également des policiers tous plus incompétents les uns que les autres (mais à ce stade c’est culturel), nous abreuvant quand même de saillies de comédies étonnantes dans ce type de film (volontaires cette fois), proposant des ruptures de ton maitrisées en plus d’une certaine respiration au sein du récit. Il faut aussi ajouter la présence bienvenue de personnages secondaires (un frère agent de sécurité et en quête de sa sœur disparue) bien intégrés, avec à la clé une ou 2 scènes de bagarre (ou plutôt de passage à tabac) gentiment régressives !
Midnight Silence, ou le petit plaisir de l’instant
Bref, on évite pas des facilités (la conclusion globale mérite une certaine suspension d’incrédulité devant une approche presque grandiloquente pour assoir son propos) et autres errances, mais Midnight Silence reste un divertissement plutôt plaisant et tenu. Malgré des poncifs du genre, on retiendra le cœur émotionnel central, des passages de tension assez efficaces, une structure narrative relativement efficace, et une mise en scène caméra à l’épaule plutôt bien tenue.
Cependant, le tout demeure beaucoup trop dans l’ombre de ses illustres inspirations, et malgré un high concept évocateur (le manque d’audition sert finalement simplement à justifier la nonchalance parfois comique du tueur), cela fait plaisir de retrouver du thriller à la coréenne….bien qu’en version light et qui ne restera pas dans les annales. Une sympathique pioche ceci dit !
Midnight Silence sort en DVD, Blu-ray et VOD le 11 mai 2022
avis
Midnight Silence peine à se hisser aux côtés de ses aînés, mais ce sous-The Chaser demeure une petite pioche sympathique de par son concept initial bien tenu et quelques passages de tension bien orchestrés. Une première réalisation des plus honnêtes, à défaut d'être inoubliable ! On en retiendra principalement la relation mère-fille centrale, véritable moteur émotionnel du métrage. Bref, c'est pas trop mal !