L’épopée du buveur d’eau nous entraîne dans les tribulations d’un héros en quête de lui-même dans l’univers déjanté des 70’s.
L’épopée du buveur d’eau est l’adaptation du roman de John Irving paru en 1972. Elle met en scène le parcours loufoque de Fred Trumper. Un personnage aussi agaçant qu’attachant dont la vie personnelle autant que professionnelle semble n’être qu’une succession de trébuchements.
4 comédiens nous embarquent dans cette histoire très fantaisiste où vont se croiser une quinzaine de personnages ! Entre eux, des liens vont se faire et se défaire au rythme des tribulations improbables de Trumper. Une comédie décalée et divertissante.
Un héros qui nous tient d’abord à distance
C’est progressivement que nous sommes entrés dans la pièce. Ne connaissant pas l’œuvre de John Irving, nous avons d’abord eu un peu de mal à comprendre où l’histoire voulait nous emmener. Nous n’étions pas non plus complètement captivés par le texte assez cru ni par l’histoire de cet anti-héros incapable de prendre sa vie en main. En effet, Trumper – interprété par Laurent Clément – accumule tellement les échecs qu’il finit par se retrouver au centre d’un documentaire sur le sujet !
Il y a d’abord cette thèse de doctorat en « nordique primitif inférieur » qu’il ne parvient pas à terminer et qui fait effet de comique de répétition tout au long de la pièce ; il y a aussi son mariage qu’il échoue à faire durer et son rôle de père qu’il fuit ; en passant par ses fameux problèmes urinaires qu’il ne se résout pas à soigner… Et si l’on se laisse peu à peu toucher par son personnage et son histoire, on commence clairement par le trouver insupportable !
« En résumé, un ami d’enfance mort, un autre qui m’avait piqué ma femme, un divorce et un fils perdu… En 36 heures. »
Une épopée entre humour et émotions
Mais à mesure que les scènes se succèdent, le fond prend forme et le puzzle se dessine peu à peu. L’ensemble gagne en intensité, en profondeur. Et chaque personnage commence à nous apparaître dans toutes ses nuances, ses complexités et ses quêtes personnelles. Ainsi, la seconde moitié nous offre quelques moments forts et captivants.
Notamment lorsque Trumper et Tulpen – la mère de son enfant, interprétée avec une belle authenticité par Chloé Fortoul – se parlent à cœur ouvert tandis que Ralph, le réalisateur, s’obstine à tenter de les enregistrer pour son fameux documentaire sur l’échec ! Une scène qui réussit à être drôle – burlesque même ! – et émouvante tout à la fois, et qui résume finalement assez bien l’esprit de la pièce. Un très chouette moment !
Et puis… quelle surprise de redécouvrir Rémi Mazuel dans une série de personnages tous plus loufoques les uns que les autres ! Le comédien que nous avons récemment découvert dans Le voisin de Picasso nous montre ici l’étendue de son talent. En effet, la finesse de son jeu lui permet d’être juste et de nous faire rire avec des rôles assez caricaturaux qui auraient vite fait de paraître lourds.
Ce qui n’est, ici, jamais le cas. Au contraire, le comédien devient d’une certaine façon le fil rouge de la pièce. On finit même par le guetter car, quelque soit le personnage dans lequel il apparaîtra, on sait que l’on va rire à coup sûr !
Une savoureuse plongée dans les 70’s
S’il nous a fallu un peu de temps pour nous laisser toucher par l’histoire, ce qui nous a immédiatement séduits en revanche c’est l’atmosphère vintage et décalée de cette épopée. En effet, il se dégage beaucoup de charme de cette pièce et de la dynamique de la mise en scène d’Anaïs Alric qui permet de mêler humour et émotions avec habileté. On s’y croirait lorsque la mer déroule ses vagues en arrière-plan de la scène ! Et on se sent bien dans cette ambiance seventies teintée de nostalgie…
Ambiance posée par quelques éléments de décor comme le papier peint projeté ou le fameux téléphone à cadran orange ; mais aussi par les costumes et notamment l’iconique pantalon à fleurs de Tulpen que l’on ne peut que lui jalouser ! Sans oublier la bande-son qui est un pur régal. Du légendaire Let’s twist again de Chubby Checker à Sunday morning de The Velvet Underground ; en passant par In the summertime de Mungo Jerry ou par le divin The sound of silence de Simon & Garfunkel… on n’a qu’une seule envie : faire durer le plaisir !
De quoi ressortir de cette épopée le cœur léger, un sourire aux lèvres, et des airs entraînants plein la tête…
L’épopée du buveur d’eau, d’Arnaud Romain, d’après le roman de John Irving, mise en scène Anaïs Alric, avec Laurent Clément, Chloé Fortoul, Fanette Jounieaux & Rémi Mazuel, se joue le lundi et le mercredi à 19h ou 21, jusqu’au 01er juin, au Théâtre Le Funambule Montmartre.
Avis
Cette pièce haute en couleurs nous enveloppe dans son ambiance rétro et nous fait rire avec son univers décalé. On passe un bon moment avec cette troupe pleine d'énergie et de fraîcheur.