Dans Le Torrent, José Garcia et André Dussollier s’affrontent mollement et Anne le Ny échoue à étoffer un thriller qui se dégonfle très rapidement.
Le Torrent marque plusieurs retours : tout d’abord celui de la discrète Anne le Ny à la réalisation, auteure de deux excellents longs-métrages, Ceux qui restent et Les Invités de mon père, et incontournable second-rôle vue notamment dans Le Goût des autres et Intouchables. De l’autre, celui de José Garcia dans un rôle dramatique, s’étant récemment étendu sur l’absence d’audace dans la comédie hexagonale et ayant délivré une solide performance dans Totems. Puis enfin, la rencontre entre ce dernier et l’immense André Dussollier, pour un duel malheureusement manqué.
Pluie de clichés
Le Torrent nous conte ainsi la disparition de la femme d’Alexandre (José Garcia), chef d’entreprise et père de famille accompli. Après une violente dispute, son épouse (Ophélia Kolb) a disparu dans la nuit, avant que des pluies torrentielles ne viennent compliquer les recherches. Mais la fille d’Alexandre (Capucine Valmary), présente lors du drame, est étouffée par la culpabilité et semble en savoir plus qu’elle ne voudrait bien le dire face au père de la disparue, campé par André Dussollier. Une photographie froide, la montagne, un cadavre, des plans rapprochés et des mensonges qui empoisonnent, pas de doute, nous sommes bien dans un thriller.
Un thriller qui pose convenablement ses bases malgré un jeu d’acteur parfois approximatif et un scénario qui semble cousu de fil blanc. Parce qu’Anne le Ny semble bien en peine lorsqu’il s’agit d’étendre le trouble d’un jeu de dupes où le sentiment de culpabilité paraît être un fil rouge bien peu résistant face à une intrigue qui s’effondre bien trop rapidement. Que ce soit en terme de dialogues et d’enquête, Le Torrent abonde de clichés un scénario minuscule qui semble souvent rappeler un fade téléfilm. Tout est joué d’avance, et tout ce qui reste semble bien trop rachitique pour tenir, surtout sur presque deux heures de métrage.
Torrien à dire
Là où José Garcia semble toujours impeccable dans un registre qu’il semble retrouver avec beaucoup de plaisir, André Dussollier, d’abord très émouvant, s’enfonce avec le scénario vers une conclusion expédiée à la hâte, aussi absurdement que maladroitement. Il reste ainsi des miettes à la pauvre Capucine Valmary, pourtant excellente dans les deux saisons d’OVNI(s), dont le scénario d’Anne le Ny ne sait jamais saisir le trouble, la faute à un portrait surchargé. Entre le témoin qui en sait trop, la petite fille se muant soudain en jeune femme, et l’enfant souffrant de l’absence de son père. Il ne reste ainsi que le service minimum d’un film qui accumule les facilités, et se trouve rapidement nu, sans ne plus avoir rien à raconter.
On passe ainsi les trente dernières minutes du Torrent l’air circonspect, devant une immense parenthèse de vide qui se veut creuser des personnages à qui l’intrigue n’a rien laissé. Un immense gâchis, et le sentiment de se retrouver devant une proposition inachevée, d’un scénario auquel il manque, en plus de pages, d’un véritable souffle et d’une quelconque ambition. Outre des personnages sacrifiés, il reste ainsi du film d’Anne le Ny, l’impression d’un Torrent qui prend logiquement l’eau, la faute à des fondations bien trop fragiles pour empêcher l’inondation de vide.
Le Torrent est sorti le 30 novembre 2022.
Avis
Le Torrent, malgré son habit de thriller psychologique, ne parvient pas à faire durer l'illusion d'un gâchis fade et inachevé. En plus d'une intrigue expédiée à la hâte, Anne le Ny ne sait que faire de ses personnages, sacrifiés où bien réduits à un jeu d'acteur plus qu'approximatif. Une proposition rappelant un téléfilm aux fondations bien trop fragiles pour empêcher l'inondation de vide.