L’Héritage est une production Netflix polonaise réalisée par Sylwester Jakimow qui s’est hissée au top 10 français. Un film qui ne fait pas de mal sans pour autant faire vraiment du bien.
Mis à part les premières images qui installent brièvement des personnages qui sortiront assez peu de leurs stéréotypes, L’Héritage est un huis-clos coincé entre le polar et la comédie familiale moraliste.
Réunis pour l’ouverture du testament d’un oncle excentrique et richissime, une famille polonaise disparate se retrouve dans l’immense manoir du vieil homme, à la veille d’une tempête de neige dans la campagne polonaise. Le mariage qui bat de l’aile des deux quinquas et leurs deux ados à l’arrière de la voiture, la tantine auteure de romans policiers « un peu trop riches en sexe » et son jeune amoureux – alors, gold digger ou pas? -, le mignon couple gay ; la diversité semble un peu artificielle et l’on se demande si l’intrigue viendra nous sauver.
N’est pas Sherlock Holmes qui veut
Le personnage décalé de l’oncle comme celui du majordome à la moustache en guidon, le mort qui réapparaît pour l’ouverture de son propre testament, les boiseries du manoir et son architecture truffée de passages dérobés et de couloirs secrets que l’on explorera avec l’un des enfants : les premières minutes nous évoquent une ambiance et un humour à l’anglaise et on s’apprête déjà à déguster un Guy Ritchie ou un Rian Johnson à la sauce polonaise.
L’Héritage a en effet tout d’un A couteaux tirés : une famille divisée, un meurtre inexpliqué, un testament litigieux, une enquête alambiquée dans un manoir, des mensonges éhontés. Sauf qu’ici, le déchirement ne dure pas et la vérité éclate sans la moindre dispute. Et si la voix-off et les quelques surprises piquantes nous rappellent l’humour cinglant d’un 1670, il n’en restera bientôt pas grand-chose tant le film semble sombrer inéluctablement vers la comédie wholesome qui prône les valeurs de l’honnêteté et de la famille. Une résolution à l’amiable qui manque de piquant.
L’Héritage, un escape game en famille
Pour récupérer une partie de la fortune, la famille n’a pas le choix : il faudra résoudre énigmes et quiz, préparés avec attention par Władysław, l’oncle finalement bien décédé. L’Héritage enchaîne ainsi des séquences pleines de mystère dans lesquelles on parvient difficilement à suivre l’action. En cause, un montage qui préfère les ellipses énigmatiques aux séquences actives.
Ici, l’équipe cherche un code qui semble être une série de chiffres et après avoir étiré la recherche du premier, nous les voyons seulement découvrir le dernier pour ouvrir une serrure dont on n’a jamais entendu parler. Là, un gamin ligoté fait tomber une lime avant de brandir l’arme du méchant dans la scène suivante. Un film d’enquête où l’enquête n’est pas montrée, des passages d’action dans lesquels l’action est éludée… Sylwester Jakimow nous perd en route et ne parvient pas à exploiter ses idées jusqu’au bout. Même si le comique de situation ne manque pas et que certains dialogues font sourire, notons quand même certains traits d’humour devant lesquels les traducteurs ont simplement abandonné.
Non Dawid, pas ça, pas après tout ce que tu as fait !
Le film se laisse regarder mais n’a que peu de saveur, et après une heure et demie, on fait le bilan. Les méchants sans grande détermination sortis de nulle part ont été renversés par un étonnant deus ex machina, sous la forme d’un hommage surprenant aux heures les plus sombres de Zidane. Un meurtre a été résolu sans avoir été le cœur de l’intrigue, et il n’a d’ailleurs que peu d’impact sur notre histoire ni sur le bonheur du meurtrier : c’est comme ça la morale familiale, on peut être un tueur, ce qui est important, c’est d’être vraiment honnête avec ceux qu’on aime.
L’Héritage est à découvrir sur Netflix depuis le 19 juin 2024.
Avis
Pas de doute, L'Héritage puise son inspiration d'A couteaux tirés, peut-être un peu trop. Tout du long, on a l'impression d'un déjà-vu, mais en moins bien. Alors oui, on passe un bon moment, on rigole à certaines blagues et face à certaines situations, mais en moyenne, on se demande comment on en est arrivé là. Une production polonaise qui fait sourire, on n'en demande parfois pas plus.