Les fans de cinéma de genre n’ont jamais vraiment compté sur Netflix pour dénicher les perles rares de l’horreur. La plateforme propose toutefois quelques œuvres fantastiques intéressantes, dont His House. Ajouté au catalogue en décembre dernier, ce film nous plonge dans le cauchemar halluciné d’un couple de réfugiés soudanais logés à Londres en attente de jugement.
Pour son premier long-métrage, le réalisateur anglais Remi Weekes a récupéré un projet de film sur des réfugiés politiques. Son film commence avec l’arrivée d’un couple Soudanais, Bol et Rial, en Angleterre. Les premières images montrent brièvement le naufrage de l’embarcation de fortune qui les a mené jusque-là. Puis rapidement, le spectateur découvre la maison dans laquelle les deux personnages sont relogés en attente de leur jugement. Véritable ruine, celle-ci semble néanmoins habitée par une présence qui torture Bol dès qu’il se retrouve plongé dans l’obscurité.
La découverte d’un endroit inconnu et hanté représente un thème phare du genre fantastique qui se révèle, dans ce cas, traité avec une réelle habileté. Loin de sombrer dans le cliché des fantômes hostiles tentant de faire fuir de nouveaux habitants, His House joue la carte de la subtilité. Difficile de savoir, entre les flashbacks traumatisants et les visions effrayantes, si le héros a sombré dans la folie, si un esprit malin le torture vraiment où si la culpabilité d’avoir survécu là où tant d’autres ont péri le ronge. Un dosage réalisé d’une main de maître, car si la réponse est donnée à la fin, on assiste à une montée en puissance de l’angoisse au fil de situations de plus en plus ambiguës.
His House : la maison du malheur
A la frontière entre drame social, critique politique et horreur, le film instaure une atmosphère angoissante dès le départ. La scène d’exposition nous montre la noyade des passagers de l’embarcation du couple, à laquelle leur fille n’a pas survécu. Suite à cela, les deux personnages se voient attribuée une habitation décrépie avec interdiction d’en bouger ou de trouver un travail. Alors que le scénario pourrait tomber dans l’apitoiement sur le sort des deux malheureux, il prend une tournure plus intéressante. L’assistant social, qui parait désireux de les aider, leur indique qu’en dépit de son état, cette demeure s’avère plus grande que la sienne. Cette remarque, présentée comme un simple constat, rapproche d’emblée les réfugiés et les Anglais en terme de d’égalité de logement. La dimension sociale de l’œuvre gagne ainsi en crédibilité.
La désillusion du couple à son arrivée prend une forme plus horrifique dès les premières apparitions du fantôme. Rial tente de convaincre son mari que cet esprit est bien réel et qu’il les somme de partir car cette vie ne peut être la leur. Bol, quant à lui, refuse d’y croire et veut s’intégrer à cette nouvelle société. Entre flashbacks traumatisants et fantômes culpabilisants, on assiste donc à sa lutte pour s’adapter à son nouvel habitat, tandis que sa femme le supplie de repartir. Une situation complexe qui se balance magnifiquement entre fantastique pur et drame social.
Une œuvre toute en nuances
L’alternance des thématiques abordées n’aurait sans doute pas autant d’impact sans les effets audiovisuels qui la soulignent. Sur le plan visuel, on observe des contrastes entre les couleurs grisâtres de la ville anglaise et celles des cités africaines présentées tout au long du film. L’univers soudanais brille par ses costumes aux couleurs plus vives et surtout par le rouge du sang dans lequel baignent constamment des monceaux de cadavres. L’Angleterre, plus terne, paraît plus paisible. Plus grise et pluvieuse mais plus calme et homogène.
Le son du film mérite également que l’on s’y attarde. Les chœurs aux voix très basses montent progressivement en puissance et le stress augmente avec eux ! Les bruits d’ambiance de bar ou de frôlements dans les murs contribuent aussi à l’atmosphère pesante. Tombant tels des couperets assourdissants dans les moments de climax, ces sons étudiés contribuent très largement à rendre le film purement effrayant. Mention spéciale également aux excellents acteurs, Sope Dirisu et Wunmi Mosaku dont le jeu tout en nuances sublime le film.
His House termine l’année 2020 de façon plutôt sympathique. La conclusion laisse un peu sur sa faim car la finesse du scénario aurait peut-être mérité une fin plus subtile mais le film vaut le coup. Un bon moment d’horreur intense !