Kathryn Bigelow est connue pour ses films à la limite entre le documentaire et la fiction qui s’accaparent d’un sujet d’actualité explosif (Zero Dark Thirty et la traque de Ben Laden) et qui dépeignent des situations asphyxiantes (Démineurs). Son nouveau long-métrage, Detroit, sur les émeutes raciales de la ville éponyme qui ont eu lieu en 1967 mais qui parle foncièrement de notre époque, marque l’aboutissement de ce style.
Plus de 2h d’apnée. Le film s’attarde sur un tragique événement dans un hôtel. L’ambiance est suffocante et pousse l’être humain dans ses derniers retranchements – et le spectateur à rester en apnée – tandis que le racisme viscéral de trois policiers va bouleverser des vies. Ce long huis-clos fait office de clé de voûte à une narration admirablement construite et pertinente.
Des nuances de gris dans un monde noir et blanc. Bigelow apporte de la subtilité aux personnages qu’ils soient « mauvais » ou « bons ». C’est par cet aspect nuancé qu’elle trouve la crédibilité documentaire nécessaire au traitement d’un tel sujet. Detroit est un exemple de cinéma militant qui ne se laisse pas dévorer par son propos – ce qui est loin d’être la norme. Par contre, les Oscars risquent de rapidement devenir la norme pour la cinéaste.