Aline voit Valérie Lemercier prendre les traits de Céline Dion, pour un portrait amoureux et débordant de sincérité.
Aline fait partie de ces projets risqués qui prêtait alors à sourire lors de son annonce : imaginer Valérie Lemercier incarner Céline Dion, chanteuse internationale associée au kitsch et à l’eau de rose de ses 7 à ses 50 ans avait en effet de quoi surprendre. C’était pourtant sans compter sur la passion que voue l’actrice-réalisatrice à la chanteuse, et du portrait respectueux et sincère que se révèle être Aline. C’est simple : l’on avait pas vu Valérie Lemercier aussi inspirée depuis son Palais royal ! en 2005, après le bide critique et public de son 100% Cachemire et son sympathique mais malheureusement passé inaperçu Marie-Francine. Let’s talk about love.
Enchanteur et enchanté
Il y a ainsi dans Aline une bienveillance et un amour qui se révèleront être les principaux moteurs de ce projet singulier. Parce que dès son introduction, la présentation de cette famille populaire répondant au doux nom de Dieu, également parents de 14 enfants, aurait rapidement pu verser dans la parodie facile, alors que le scénario de Valérie Lemercier et Brigitte Buc en évite intelligemment le piège. Tout est filmé dans chacun des visages de cette famille, sans le sou, sous l’aspect de la bonté et de la bienveillance, tous liés par une passion commune pour la musique. Une musique qui resserrera les liens et permettra à la petite dernière de la famille de se tailler une place de choix.
Cette dernière c’est Aline Dieu, et si l’incrustation du visage de Valérie Lemercier intrigue d’abord, l’on se trouve rapidement aussi charmés que convaincus par la prestation de l’actrice dans la peau d’une jeune enfant. Parce que son innocence, sa passion et son véritable don du ciel seront autant de plaisirs communicatifs aussi joyeusement interprétés que superbement mis en scène par une actrice tout aussi inspirée en tant que réalisatrice. L’on plonge ainsi avec bonheur dans ce faux-biopic aux airs de conte suranné où la campagne québécoise se mue alors en petite bourgade d’un autre temps, où le talent d’une jeune princesse l’emmènera rapidement tutoyer les sommets.
Amour, gloire et générosité
Au-delà de la bluffante partition de Valérie Lemercier, le casting d’Aline se révèle ainsi être d’une redoutable efficacité. Des visages peu connus chez nous, ceux de Sylvain Marcel, dans la peau de Guy-Claude Kamar et Danielle Fichaud, sous les traits de la mère d’Aline Dieu paraissent instantanément comme de véritables évidences. On les imagine ainsi aisément nommés dans les César des meilleurs seconds rôles et faire de l’ombre à la concurrence tant leurs prestations s’avèrent aussi justes que débordantes de sincérité. À eux deux, ils rendent ainsi juste le passage d’une jeune fille à une icône internationale dans un conte de fée qui se noie malheureusement dans sa propre générosité.
D’une femme ordinaire au destin extraordinaire, d’une chanteuse internationale qui ne se voyait qu’en grande chanteuse populaire, Valérie Lemercier choisit ainsi de creuser dans le dernier tiers d’Aline les zones d’ombres d’une artiste emprisonnée dans un royaume où elle n’a jamais eu la force de régner en solitaire. Si la comédienne et cinéaste était jusqu’alors parvenue à nous faire ressentir le poids pour l’artiste d’un imposant don et d’une trop étouffante vie de carrière, la flamboyance et l’amour se muent malheureusement en un trop long moment d’errance. La cinéaste ne parvient alors plus à instiller le souffle nécessaire pour muer son personnage en une figure tragique, et égale en générosité ce qu’elle perd en efficacité. Débordant, peut-être trop, Aline peut cependant se targuer de sa belle ambition, de son réel plaisir et de son amour tous deux irrémédiablement communicatifs.