Comme de nombreuses histoires, celle-ci commence au fond d’un bar… Par une sombre soirée d’Halloween, au sous-sol d’un lieu geek, nous avons rencontré un homme accoudé à table. Barbu, l’air concentré, cigare au bec, camouflé par une peau de vache, Butcher Billy, célèbre boucher de la pop culture, signait son dernier bouquin, Butcher Billy’s Strange Fantasy. Par curiosité ou par folie, on s’est adressé à cet animal underground. Entre réalité et fiction, l’illustrateur nous a entraînés dans ses pas…
Je suis Butcher Billy (Billy le boucher). C’est mon identité secrète, j’ai un nom de naissance, qui est secret évidemment, vous voulez le savoir ? Soupir. Allons-y. Mon nom est réellement Billy, Billy Mariano Da Luz, un nom brésilien. J’ai 40 ans, je suis diplômé en design, au Brésil.
Qu’est ce que c’est que cet avatar ?
Il y a quelques années, j’étais très frustré dans mon travail routinier de Directeur artistique dans une agence numérique. Donc, j’ai commencé à me souvenir de toutes ces choses qui m’avaient inspirées lorsque j’étais enfant, les films, une musiques, comics, street art… Donc j’ai essayé de m’amuser avec ces icônes, ces concepts que j’aimais adolescent. C’est comme ça que Butcher Billy est né.
Je cherchais un pseudo pour signer mes œuvres, qui étaient très différentes de celles que je créais au bureau. Mon nom là-bas était plus entrepreneurial, très différent des créations de Butcher Billy. Je devais trouver un nouveau nom qui correspondait plus à ce que je réalisais désormais. Comme je découpais tout plein de choses, comme des morceaux de comics, les mixant avec des pochettes d’album. J’abattais, je hachais toutes ces choses, ces scénarii, les mélangeant, j’étais un boucher quelque part.
Au départ, je me pensais comme un Bansky brésilien, je voulais être seulement un nom. Ça n’a pas fonctionné car rapidement les gens m’ont trouvé sur internet. Les gens savent qui je suis, donc j’utilise mon personnage et l’exagère. C’est ainsi que Butcher Billy est arrivé, j’apparais comme un boucher ou comme une vache. Une vache ridicule évidemment ! Rires.
Ta thématique préférée ?
J’aime beaucoup les films, le cinéma, c’est la première chose que j’ai commencé à dessiner étant petit. SOS Fantômes, a été première chose que j’ai commencé à griffonner à l’école, à la place d’étudier.
J’aimerais dire que ce sont les films, mais tout est important. David Bowie était un personnage hyper intéressant pour moi, enfant. Cet homme habillé comme un extra-terrestre, avec le maquillage, j’étais fasciné même sans aimer la musique. Son image me paraissait parfaite. Il ressemblait à un super vilain, à un super héros ou à un alien.
Si l’on pense que tout est connecté, David Bowie est une personnalité de la musique, que j’ai imaginé comme un personnage de comics, de film, pas comme une personnalité musicale. J’ai toujours été fasciné par les personnages colorés, comme le groupe Kiss, avec le maquillage… Tout est connecté.
Ta meilleure réalisation ?
Mon travail sur Black Mirror. Ce n’est pas forcément le plus satisfaisant personnellement, mais le plus célèbre que j’ai pu faire. Car lorsque je faisais la création Black Mirror sur internet, juste pour le fun, je n’imaginais pas l’ampleur que ça prendrait. Que le réalisateur Charlie Brooker m’appellerait, pour travailler sur le show.
Ça a été une immense surprise pour moi. Il y a quelques mois, après avoir produit ce travail et lorsqu’il est apparu sur Netflix, il a été mis à disposition du monde entier. Tout le monde pouvait le voir, pas seulement les internautes, mis à part la Chine et la Corée du Nord. Je pense que c’est ce travail que j’ai fait pour la série. Ce travail qui a été accompagné de l’illustration pour la bande-son, etc.
Quelles difficultés rencontres-tu lorsque tu crées ?
Ce qui est amusant c’est que je ne dessine pas directement, je suis différent de la plupart des artistes. Lorsque je commence à créer quelque chose, généralement tout ce que je veux faire est déjà ordonné dans ma tête.
Je passe beaucoup de temps à réfléchir à ce que je vais faire avec ces morceaux d’œuvres d’art, je passe des jours, des semaines à préparer une idée, à l’assembler dans ma tête. Quand je tiens quelque chose, que c’est bien agencé, alors je commence à dessiner. Commencer à créer, c’est le moment le plus facile et le plus rapide du boulot. J’ai déjà toute l’idée, l’image dans ma tête, préparée.
Une anecdote qui t’es arrivée ?
Les gens aiment mon travail en France, car j’utilise des icônes de la culture populaire internationales. Il y a quelques années, alors que j’étais au Brésil, j’ai décidé de créer des choses qui auraient eu un écho plus local, national.
J’ai commencé à faire de sérieux projets, qui ont tourné autour de certains membres religieux qui sont millionnaires au Brésil. Des pasteurs, qui ont des églises à leurs noms et qui, comme par hasard, sont plein aux as. J’ai pris tous ces gens, 5 ou 6, qui sont comme des évêques au Brésil, je les ai dessinés comme des diables de la pop culture. Des Diables de films, comme Hellboy… Pour faire passer un message, donner du sens.
Ils n’ont pas aimé. Ils ont très mal réagi. J’ai commencé à comprendre que quelque chose clochait vraiment lorsque les gens ont commencé à me prévenir que les journaux, sites internet, publiaient mon contenu, que je devenais une cible. Qu’ils poursuivaient les gens qui publiaient mon contenu. Mais il ne m’ont pas poursuivi en procès, je ne sais pas pourquoi, peut-être qu’ils pensaient que je n’étais pas brésilien, que je venais d’un autre pays. C’était très étrange.
Que penses-tu de ton livre ?
Je suis dépassé. Regarde la taille de ce truc, il est énorme, le premier était moitié moins grand. Le nombre de pages a doublé ! Lorsque je l’ai vu pour la première fois, j’étais fou, c’est vraiment gros, je n’avais pas réalisé que j’avais créé autant de travaux. Regarde le nombre de pages, et certaines d’entre elles on 4, 5, 6 illustrations dessus ! Quand j’ai vu ça, j’ai pensé, mon dieu qu’est ce que j’ai fait de ma vie ?
Quelque chose que tu rêves de faire ?
Tu veux que je sois honnête ? J’ai envie de faire une exposition à Paris. J’aime beaucoup cette ville. J’ai pu réaliser que les français aimaient vraiment mon travail, bien plus que dans mon pays. Je fais des livres indépendants, underground ici et je les retrouve même dans les supermarchés. Les gens aiment ce que je fais et donc ça m’inspire pour continuer. C’est pourquoi que je veux faire plus de choses ici.
Que vas-tu faire ensuite ?
Une exposition à Paris avec Artitude ! Rires Apporter mon prochain projet ? J’ai un nouveau vinyle de Black Mirror qui va sortir pour l’épisode de l’USS Calistor, et dans 50 jours je vais avoir une exposition à Chicago, et je serais là-bas.
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