La suite tant attendue de Severance nous livre ses secrets (enfin pas tous) dans cette saison 2. Accrochez vous, ça va swinguer !
La série de science-fiction de Dan Erickson et réalisée essentiellement par Ben Stiller que personne n’attendait, et encore moins sur ce terrain, a surpris en bien et conquis les esprits. Severance est dans la lignée des séries Apple TV+ de qualité, plateforme non officiellement spécialisée dans les œuvre de SF. Après avoir mijoté 3 ans en restant sur le final explosif de la saison précédente, nous pouvons enfin retrouver nos personnages où nous les avions laissé. Ou du moins, presque.
Dans la saison 1 on faisait la connaissance de 4 employé.e.s de bureau qui avaient accepté de voir leur esprits et souvenirs divisés entre leur vie en entreprise et leur vie privée. L’objectif avancé de cette méthode est de préserver les secrets de la corporation et protéger lesdits employé.e.s. Mais comme on dit : « qu’est ce qui pourrait mal se passer » ?
Attention : si vous n’avez pas vu ou terminé la saison 1 de Severance, cet article peut vous divulgâcher des éléments clés de l’intrigue !
Innie winnie tiny winnie
Les internes à l’entreprise, surnommés les Innies, ont développé leur propres histoires, et c’est en quête de liberté qu’ils ont élaboré un plan pour interférer dans la vie de leur alter égo extérieurs (les Outies). En « s’éveillant » en dehors de des bureaux, Mark S. (campé par un Adam Scott mono expressif de stupéfaction), réalise qu’une personne que son Outie croyait décédée est toujours en vie, employée dans la même entreprise. Les autres ne sont pas en reste et découvrent tour à tour un fait marquant pour la suite des intrigues. Il aura fallu 3 ans pour savoir comment les proches, les Outies, et la corporation Lomen ont été impactés par ce simple éveil.
Cette saison 2 nous fait croire au début que l’entreprise a changé, et qu’elle prend soin de son personnel. On comprend vite que la seule évolution concrète dont est capable cette organisation réside dans sa capacité à manipuler les informations et les esprits, par des méthodes aussi inattendues que malaisantes. Ainsi, dès le deuxième épisode, le héros qui n’est pas dupe, fait de son problème celui de tous, pour retrouver la personne disparue dans la vie de son Outie.
A cette occasion, Adam Scott développe désormais quelques émotions supplémentaires, qui lui seront utiles. Il fédère le reste de l’équipe avec des discours inspirants et construits comme ceux d’AOC (Alexandria Ocasio-Cortez), et c’est gonflée de nouveaux espoirs que la troupe de l’open space repart en quête de vérité. Mais les masques qu’ils veulent faire tomber sont des poupées gigognes.
L’absurde a une place importante dans cette série
On suit le mouvement, comme les personnages, dont chaque pas avance vers l’inconnu et l’absurde, comme le fait de trouver chèvre, mouton et autre bétail qui broutent très normalement dans les sous sols. Mais ne vous méprenez pas : c’est bien une caricature littérale de l’entreprise et non une direction artistique, et toute ressemblance ou écho avec des situations réelles est volontaire. Cette saison 2 de Severance, appuie encore plus fort sur une vision extrême et quasi religieuse de la loyauté attendue envers la direction. Les scénaristes on grossi le trait ? A peine. On pousse même les murs de la décence en découvrant rapidement comme l’aspect définitif et absolu de la mort est très différent pour les Innies.
Severance, ou le miracle de l’amour
Avec l’absurdité du monde de l’entreprise, le deuxième grand axe de cette saison 2 c’est l’amour. Les personnages dissociés permettent encore plus de personnages pour le même nombre d’acteurices – même dans Doctor Who on n’avait pas osé ça. On salue au passage la performance du casting lourd, qui parvient à nous faire comprendre qui est qui, par de simple postures ou expressions. Le terrain de jeu des scénaristes pour les triangles amoureux est désormais immense et ouvre plusieurs portent dans le dédale déjà complexe des intrigues.
Rassurez vous, ces situations ne sont compliquées que pour les personnages. On a une vue d’ensemble, et c’est bien notre privilège de spectateur. Cette saison 2 n’a pas besoin de redonner les règles de fonctionnement de son univers, alors elle peut prendre son temps pour bien poser les évènements et laisser le temps nécessaire de digérer les informations.
La construction des personnages oscille également comme une courbe de pensée. Chacun.e avance à son rythme, stagne ou explose d’un coup, à tour de rôle. On se prend d’affection et d’empathie pour tout le monde, même pour les méchants, pour lesquels un peu (très peu) de contexte commence à nous être donné. Cette saison prend son temps, mais pas trop, juste ce qu’il faut pour avoir le bon rythme. C’est encore une évolution par rapport à la saison 1, dans laquelle on distinguait facilement une première et une deuxième partie, de façon simpliste.
Severance saison 2 : ce qu’aurait fait Nolan en se pignolant moins le cerveau
C’est ainsi que, paradoxalement, les dédale d’intrigues peut être compris correctement sans nous perdre. Le rythme est précis et chaque scène ou information se voit ensuite laisser le temps nécessaire pour être intégrée, avant d’avancer encore. L’autre subtilité qui donne une compréhension d’ensemble, est la diversité des points de vues. Si la série interroge sur ce qui fait de nous des personnes entières et légitimes, elle apporte une réponse partielle par le regard que nous portent les autres.
Dans la saison 2 de Severance, les relations amoureuses, naissantes, non assumées, ou consommées, démultiplient et aggravent encore ces prismes de Shrodinger. Notre boussole morale est constamment chamboulée, et on aimerait avoir des réponses simples pour que tout le monde soit heureux. Mais il est évident que les scénaristes aux commandes ont déjà des plans, et dans la mesure où on ressent leur affection des personnages à travers l’écriture, on choisira de leur faire confiance.
C’en est fascinant comme on devient observateurice d’une expérience scientifique et sociale, et comment on prend plaisir à voir avec bienveillance cette dissection des relations humaines.
Severance Saison 2 – disponible sur Apple TV le 17 janvier 2025
Avis
Le tempo est réglé au métronome. Cette saison 2 prend le temps de nous laisser rêver, donne des réponses, pose de nouvelles questions, mais sans frustrations. La saison 2 de Severance montre la maîtrise des scénaristes et des acteurices dans leur capacité à nous emmener encore plus loin sans nous perdre. C'est toutefois un repas assez copieux qu'il conviendra de savourer lentement pour favoriser la digestion d'informations.