Petit OVNI d’animation, Mon ami robot (Robot Dreams) débarque pour clôturer l’année en beauté. Initialement présenté au Festival de Cannes, ce nouveau film de Pablo Berger s’impose à la fois comme une déchirante histoire d’amitié, et comme une exaltante thérapie servie dans un écrin visuel chatoyant. Un très très bon cru !
Pablo Berger est un cinéaste espagnol plutôt atypique. Il suffit de voir Blancanieves (relecture post-moderne muette de Blanche-Neige dans l’Andalousie des années 20) ou bien la comédie noire fantasque Abracadabra pour se rendre compte qu’on a affaire à un réalisateur aux influences multiples, capable de se renouveler à chaque métrage. Mon ami robot ne déroge pas à la règle, dans cette première incursion au sein du monde de l’animation.
Amateur de livres d’images, c’est ainsi qu’il tombe sur Robot Dreams de Sara Varon, une BD nous présentant un New York foisonnant des années 80. Le film prend ainsi le même setting pour en faire un personnage à part entière : un décorum vivant peuplé d’animaux anthropomorphiques. C’est ainsi que nous rencontrons Dog (un chien oui), âme solitaire souhaitant désespérément un ami avec qui partager des émotions au quotidien.
Ce dernier va ainsi acheter un robot : le début d’une intense amitié au cours de l’été, qui va malheureusement prendre un coup dans l’aile. Alors que le robot tombe en panne suite à une après-midi à la plage, Dog est forcé de l’abandonner jusqu’à la prochaine saison. Vont-il se retrouver à nouveau ?
Mon ami robot : lien nostalgique
Mon ami robot a tout du film d’animation familial et bon enfant si on s’attarde succinctement sur l’identité visuelle du film : un design aux traits simples, mais dans un New York fourmillant de détails. C’est coloré, superbement animé, tandis que le sound design global s’avère être un autre outil prépondérant dans la manière d’assoir une narration émotionnelle.
Car oui, Mon ami robot est entièrement muet, mis à part quelques bruitages en lien avec la radio ou de la musique. Un pari complètement tenu, où la mise en scène et le découpage suffisent à transcrire chaque intention de Pablo Berger. Nous sommes ainsi dans la quintessence même du storytelling, dans un récit surprenamment mature !
En effet, Mon ami robot s’avère jovial, drôle et extrêmement touchant dans toute sa première demi-heure, alors que Dog et son robot vivent une relation fusionnelle, dopée par Earth Wind & Fire (vous n’écouterez plus jamais « September » de la même façon). Un premier tiers vibrant, dopé par le New York vivant et cosmopolite d’antan.
Le récit lacrymal que l’on a pas vu venir
Puis patatra, Pablo Berger nous fait nous attacher à cette relation pour mieux nous détruire de l’intérieur, alors que Dog ne peut plus atteindre son robot, gisant éternellement sur la plage pour cause de dysfonctionnement. Dès lors, Mon ami robot se mue en réflexion déchirante sur la notion de deuil relationnel, et sur un espoir mélancolique consubstantiel.
L’occasion donc de tirer sur la corde sensible, tout en nourrissant chaque péripétie de Mon ami robot par l’espoir du spectateur que le tout se finisse en happy end. Et c’est là que Pablo Berger fait preuve d’audace dans sa capacité à infuser un discours à la fois adulte et universel sur le caractère éphémère des relations, et notre propre recherche de catharsis émotionnelle (la reconstruction par pièces détachées n’étant pas seulement littérale dans le métrage !).
Histoire universelle surprenante de maturité
Alors que Dog commencera à côtoyer une nouvelle compagne, ou que Robot expérimente plusieurs rêves lucides (allant vers des références cinéphiles telles que Le Magicien d’Oz pour mieux proposer de nouvelles idées de mise en scène), le métrage évite tout poncif du genre jusqu’à un excellent final, à la fois lucide et cathartique.
Car derrière son canevas pouvant laisser penser à un étrange film de SF pour enfants, Pablo Berger fait de Mon ami robot une belle et tendre réflexion sur les regrets et la nécessité de réussir son deuil, dans une trame intelligente à multiples niveaux de lecture. Un immanquable de cette fin d’année tout simplement !
Mon ami robot sortira au cinéma le 27 décembre 2023
avis
Avec Mon ami robot, Pablo Berger signe un très bon film d'animation, qui derrière son design attrayant et son canevas amusant, se permet de livrer une surprenante histoire sur le deuil relationnel (qu'il soit amoureux ou amical) dans un récit universel truffé d'idées de mise en scène. Tendre, drôle, émouvant..un immanquable de 2023 tout simplement !