Dans Identités, Catherine Lara et son violon nous entraînent dans l’univers des danseurs de la Compagnie Kumo, au rythme de ses compositions et de musiques du monde.
Ce spectacle assez singulier aborde à travers la danse, la musique et le violon notre rapport aux réseaux sociaux, notre place dans la société et notre relation à l’autre. Deux générations, deux univers artistiques, des cultures et autant d’identités qui se rencontrent avec virtuosité et s’unissent pour transmettre un même message… qui ne nous parvient toutefois pas toujours clairement.
« Entre nous, pas de fossés, seulement des passerelles. »
La compagnie Kumo embrase la scène
Des danseurs recouverts jusqu’au visage d’un tissu noir entrent sur une scène plongée dans la pénombre. Seules leurs lampes frontales balayent le sol et les airs de leur lumière, dessinent des ombres au rythme de leurs mouvements. Un peu plus tard, les visages à nu, ils danseront tels de la lave en fusion dans une lumière rouge brasier, le regard collé à leurs écrans, aliénés. Une voix résonne : « Derrière nos écrans de fumée, on sévit, on s’évite, on s’invente des vies. »
Puis, comme pour un peu moins détester leur image peut-être, tous semblent courir après une lumière impossible à capturer longtemps, qui ne fait que voler de l’un à l’autre, qu’ils sont prêts à tout pour récupérer, jusqu’à la violence. Les corps s’attirent, se repoussent, et si la femme harcelée se mue sous nos yeux en super-héroïne, la main de l’autre se dérobe sans cesse, cet autre qui n’est pourtant que notre reflet, si semblable dans sa différence… C’est en tout cas la lecture que nous avons faite de quelques-uns des tableaux qui s’enchaînent avec une énergie et une intensité folles.
Envoûtante Catherine Lara
Il y a donc la danse, et puis il y a le violon. Si ces deux langages cohabitent sur scène, partagent une énergie dont on s’imprègne volontiers, ils ont néanmoins du mal à former l’unité à laquelle on s’attendait, à entretenir un véritable dialogue. Disons qu’ils auraient tout aussi bien pu exister indépendamment l’un de l’autre sans que l’on n’y perde rien. Pour autant, le spectacle et la magie sont là. Celle qui émane des corps de ces danseurs et danseuses de breakdance et hip hop, et bien sûr celle du violon majestueux de l’immense et sensible Catherine Lara qui se fait aussi subtilement conteuse.
Autre petit regret, le manque de lisibilité de certains tableaux, mais surtout des projections visuelles où les danseurs et danseuses nous apparaissent dans différentes mises en scène qui échouent pour la plupart à transmettre un message clair. Le thème général du spectacle pourtant fort, important, si riche, avait de quoi venir nous toucher au cœur de bien des manières, ce qui ne s’est malheureusement pas passé. Nous nous sommes laissé porter, sans être véritablement transportés.
Une création engagée sur les identités
Mais tout de même. Quand la musique électro-pop ou d’inspiration cinématographique cesse enfin de tout recouvrir et que seul le violon de Catherine Lara vient résonner avec subtilité aux côtés des corps en mouvement, le temps alors se suspend. Une respiration, enfin. Un instant de contemplation qui nous ravit. C’est d’ailleurs aussi ce qui arrive lorsque la voix envoûtante de la musicienne se fait entendre pour semer quelques paroles chargées de poésie, de paix, de tolérance.
« Tu es singulier et pluriel ; tu es unique-versel… » On aurait envie de toutes les noter tant elles sont inspirantes et porteuses d’un message d’espoir que l’on se repasserait volontiers en boucle… C’est aussi le cas du dernier tableau, sublime, où tout ce qui était jusque-là très sombre finit enfin par laisser entrevoir une lumière tandis qu’un drapeau blanc s’agite au milieu des danseurs désormais vêtus de cette même couleur. L’émotion que nous attendions tant s’invite enfin. Cette dernière image est celle qui restera, qui nous fait nous lever et applaudir bien fort.
Identités, musiques Catherine Lara, mise en scène et écriture Compagnie Kumo, se joue du 30 janvier au 19 mars 2024 à La Scala Paris.
Avis
Le spectacle est bel et bien là, l'émotion malheureusement un peu moins. Mais l'engagement de ces artistes, le message qu'ils défendent et le talent qui ravit nos yeux et nos oreilles suffisent à nous faire passer un moment fort.
Un commentaire
Magnifiquement commenté !
Le violon accompagnant des « corps en mouvement « ….. un accord envoûtant !